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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 02:19

Elle est là, en face de moi.

 

y'a mes oreilles qui entendent le pire, y'a mes yeux au bord des larmes.

J'essaie de contenir, je mène un entretien.

Enfin, nous sommes deux,

heureusement,

c'est soutenant

c'est rassurant

je sais que ma collègue est touchée tout autant que moi.

 

Parfois je me demande quel travail je fais.

Nous n'avons pas de prime pour toute la violence qu'on se reçoit,

en pleine face, en plein dans le coeur,

on reçoit,

ces histoires de vies parfois,

pleines de fracas

pleine de malheurs,

et ça nous serre, tout à l'intérieur

du coeur.

 

ça fait des mois que Madame et moi

on se côtoie,

 

après ma collègue est arrivée

parce que c'était très compliqué

 

j'ai demandé une co-intervention,

parce qu'on est un de ses seul soutien,  

et la soutenir toute seule,

bein franchement, j'en perdais mon latin.

 

D'autant plus que Madame et moi,

ça résonne sévère,

elle me fait penser à moi.

Mais ça, même en équipe,

je ne me suis pas trop permise d'en parler,

chez nous, chez les travailleurs sociaux,

on n'a pas trop bien le droit de parler d'ça.  

 

Grossière erreur,

on ne travaille qu'à l'intérieur de relations humaines,

entre les personnes que l'on rencontre et soi,

on ne travaille qu'avec sa personnalité

marqué de notre vécu

on ne travaille qu'avec ce que l'on est

avec nos forces et nos fragilités.

 

Madame Katmandou, je l'ai capté,

et ce, peut etre bien dès la première fois,

Madame Katmandou,

oui,

c'est un peu moi,

fragile et forte à la fois,

jamais à vouloir se laisser manquer de respect,

Madame Katmandou à la rage,

la rage de vivre, la rage de survivre,

et ça,

ça m'a interloqué le coeur,

mon double ou presque,

était en face de moi.

 

Presque, parce que,

Madame Katmandou et moi,

le même vécu,

on l'a pas.

 

Mais on revendique, avec nos trippes,

Inscrit dans nos personnalités,

on n'aime pas le manque de respect 

 

Je suis malheureuse d'entendre,

ce jour là,

ce qu'elle me raconte là,

ça me touche vraiment,

je l'aime bien Madame Katmandou,

je suis révoltée qu'elle est vécu tout cela.

 

Et si j'écris ce petit texte, c'est aussi pour lui rendre hommage,

pour sa force et son courage,

d'élever aujourd'hui deux enfants

à vingt deux ans

seule

comme ça.

 

Bref, je me sens un peu responsable,

de ce qui se passe là,

ai-je été trop loin..

 

Mme Katamandou

au départ, ne parlait pas.

Enfin,

elle parlait beaucoup Mme Katmandou,

Mais peu de ses émotions,

peu de ce qui l'animait vraiment tout au fond,

C'était comme kéblo profond

à l'intérieur de son coeur.

 

Alors, comme Mme Katmandou

était prise 

au coeur de relations

empruntes de violence,

Comme Mme Katmandou,

réagissait à la violence

par de la violence,

et que ses deux enfants,

qu'elle aime profondément,

étaient témoins de toute cette violence là,

je l'ai brassé, dans tous les sens,

à la questionner sur sa violence.

 

ça a parfois était animé entre Mme Katmandou et moi,

Parce que je n'avais pas vraiment d'autre choix 

que de résister à sa résistance,

même si je savais que ça lui faisait parfois violence.

 

C'est que je l'aimais bien Mme Katamandou,

et c'est toujours avec cette bienveillance là

que résistant à sa résistance

je me voyais parfois lui faire souffrance

à la brasser comme ça dans tous les sens.

 

Et si mon intervention était de l'aider

à préserver ses enfants,

j'intervenais aussi

parce que

pour elle

j'avais un grand souci.

 

Le souci de l'aider à se construire

de toutes ses relations dans sa vie

où la violence d'autrui

la violence de la vie

l'avait elle même violentée.

 

Mme Katmandou n'avait connu que la violence,

Mais Mme Katmandou disait qu'elle n'avait pas besoin de parler de ça,

Mme Katmandou était sujette à la violence,

Mais ça n'était pas en lien,

pour elle,

avec toutes ses souffrances là.

 

Et puis ses enfants, eh bien, ils savaient comment elle était.

 

Moi je demandais toujours à Mme Katmandou,

si elle voulait que ses enfants

plus tard,

répondent aux stimulis de l'existence,

par de la violence.

 

Un peu embêtée,

elle me disait,

mes enfants ne se laisseront

pas faire.

 

En même temps,

peut être bien que c'était plutôt compliqué

tout ce que lui racontais.

 

Mme Katmandou,

elle n'avait connu que la violence,

le père de ses enfants,

son père,

l'abandon précoce de sa maman,

la séparation d'avec ses grands parents,

Mme Katamandou,

je ne sais même pas,

si elle se doutait que la vie

pouvait se mener sans violence.

Peut être bien que si,

mais c'était très loin,

jusqu'a ses onze ans,

avant de s'envoler chez son Papa,

ses grands parents l'avait élevé avec bienveillance.

C'est après,

qu'elle avait connu la violence.

 

Alors je lui disais,

Mme Katmandou,

si vous voulez sortir de cette violence,

il va falloir parler de cette violence,

de toute façon,

pour les enfants vous ne pouvez pas avoir d'autre choix.

 

Elle n'était pas contente Mme Katmandou,

mais elle venait toujours aux rendez-vous.

Et desfois, on s'entendait vraiment bien.

je la brassais

mais toujours

aussi

je la valorisais

sur toutes ses capacités

que je percevais

qu'elle avait.

 

Et puis parfois aussi,

on partageait

des moments rares,

un jour alors que ja recevais

au service

à l'accueil:

 

"Regardez Mme...., Sambala Marche..."

 

Sambala marchait devant moi.

 

Je crois que c'était la permière fois

que j'étais émue autant que ça

de voir un enfant faire ses premiers pas..

 

"Bravo Sambala...

vous devez être fière Mme Katmandou!"

 

"oui!"

 

Des moments,

comme ceux là,

dans mon métier,

ça n'à pas de prix,

ça remplit le coeur.

 

Et puis notre relation s'était posée,

depuis quelque temps.

 

Même si dans mon métier

faut être patient.

 

On était en plein travail sur son histoire de vie.

Un jour Mme Katmandou avait confié

que c'est vrai,

elle avait des souffrances dans le coeur.

 

Comme ça c'était sorti.

 

Et puis elle avait commencé à faire le lien.

 

Dans son présent,

aujourd'hui,

elle retrouvait son passé

et ça lui plaisait plus bien

elle voulait changer ça.

 

Et puis un jour,

 

Ce jour là,

 

Mme Katmandou nous à raconté

parce que ça lui faisait du bien,

son changement de vie lorsqu'elle est arrivée en France,

ce changement où elle avait découvert la violence.

 

Elle etait là, face à moi. j'ai débuté ce texte comme ça.

 

y'avait mes oreilles qui entendaient le pire, y'avait mes yeux au bord des larmes.

J'essayais de contenir, je menais un entretien.

 

Mais j'en croyais pas mes oeilles et j'étais presqu'en trop plein,

en trop plein de révolte, d'une injustice de vie comme celle là.

 

Mais je trouvais ça bien qu'elle en parle

parce qu'elle nous disait que ça la libérait.

 

Mme Katmandou après un an,

à nous découvrir les unes et les autres, ma collègue, elle, moi

à partager des discussions, à échanger des réflexions,

des moments avec les enfants,

a su trouver la force

d'affronter ses émotions.

 

Mme Katmandou est forte,

car elle ne baisse jamais les bras.

 

Mme Katmandou a évolué

je la trouve transformée,

plus confiante en elle, plus sereine, plus posée,

 

Alors, avant mon départ

Mme Katmandou m'a confié

que si elle avait tant de violence avant,

c'est qu'elle n'avait jamais appris à parler.  

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